Edouard PHILIPPE s’organise pour peser dans le débat

L’ancien Premier Ministre, Edouard PHILIPPE, a récemment publié un livre évènement, « Impressions et lignes claires ». L’occasion pour le Maire du Havre de faire une intense tournée médiatique et d’afficher ses ambitions pour l’avenir, lui qui veut « participer au débat public » et compter pour 2022… et la suite.

Avant d’entrer dans le vif du sujet, une interrogation taraude le lecteur : comment écrit-on un livre à quatre mains sur Matignon et l’art de gouverner quand deux d’entre elles appartiennent à un ancien Premier Ministre et les deux autres à un Député Européen, certes ex-conseiller Rue de Varenne ? Edouard PHILIPPE et Gilles BOYER ont beau être amis dans la vie, cultiver un même sens de l’humour caustique, ils n’en sont pas moins deux êtres distincts ayant occupé des fonctions très différentes.

Sans hésitation apparente, les deux comparses séduisent le lecteur en optant pour le « nous ». Le « nous » d’un duo, de leur duo solide, vieux de vingt ans, dont ils racontent la formation autour d’Alain JUPPE. Un « nous » qui rend la lecture de l’ouvrage parfois déroutante mais toujours passionnante.

Le duo MACRON-PHILIPPE : leur premier entretien fixant leur collaboration remonte à l’entre-deux tours de la campagne présidentielle de 2017. Les mots « Matignon » et « Premier Ministre » n’ont jamais été prononcés mais, dans les non-dits du candidat, Edouard PHILIPPE a cru déceler un heureux dessein pour lui-même. Entre ces deux hommes qui se connaissent à peine ce jour-là, pas de négociation, mais un pacte signé tacitement : la confidentialité absolue de leurs échanges. Et la règle sera respectée pendant trois ans.

Leurs références culturelles : peut-on apprendre à gouverner ? Le duo répond par l’affirmative. Après la description de leurs compagnonnages auprès d’Antoine RUFFENACH et d’Alain JUPPE notamment, vient le moment de rendre hommage aux livres, aux personnages historiques, aux séries aussi qui les ont façonnés. CHURCHILL , Léon BLUM, de GAULLE. Alexandre DUMAS, Monte Cristo. Mais aussi « Games of thrones » qui enseigne « les rapports de force tout autant que l’art de la négociation et de la dissimulation » !!

Les leçons des gilets jaunes : intéressant d’entendre cette crise narrée par ceux qui étaient au pouvoir. Sans nier les causes du malaise et en particulier la faible progression du pouvoir d’achat des classes moyennes depuis 2008, l’ancien Premier Ministre pointe la responsabilité des médias, coupables d’avoir demandé aux leaders des gilets jaunes leurs avis sur tout, du matin au soir.

Quant aux commentaires de ceux qui auraient voulu que le gouvernement « anticipe » le mouvement, ils lui restent en travers de la gorge…

Présider n’est pas gouverner et vice-versa : « La vérité c’est que c’est très difficile d’être Président. Vraiment. Premier Ministre, ce n’est pas facile non plus, je ne vais pas expliquer le contraire, mais Président de la République, c’est vraiment dur ». Voilà qui justifie, sans doute, la distance affichée par Edouard PHILIPPE au moment de quitter Matignon, « pour respirer un peu ».

Un livre qui se lit avec beaucoup de plaisir, qui rend leurs auteurs sympathiques, offre une vision moderne de la conception de l’engagement en politique et invite, inévitablement, à imaginer qu’Edouard PHILIPPE n’en a pas fini avec la République…

(« Impressions et lignes claires », chez JC LATTES , 15,99 €).