Circulez, tout va bien !
Un décret, adopté début novembre, prévoit la généralisation, pour les fonctionnaires de Seine Saint Denis (93), d’une prime dont le montant pourra grimper jusqu’à 10 000 euros après cinq années passées dans le département.
Baptisée « prime de fidélisation territoriale », cette gratification vise à décourager les velléités des agents tentés de demander précocement leur mutation dans un autre territoire et à donner des ailes à ceux qui se font prier pour aller travailler dans un département, considéré comme le plus chaud. Contradictoire, alors qu’on nous explique que tout s’y passe bien.
Pourtant, département le plus pauvre de France métropolitaine, la Seine Saint Denis peine à faire oublier le fort taux de chômage de sa jeunesse (près de 35%) et une insécurité croissante, sur fond de trafic de stupéfiants et de montée de la délinquance dans les cités. Le quotidien des agents de l’État en contact direct avec la population n’est que rarement facile. Ils jouent pourtant un rôle essentiel, incarnant, jour après jour, les valeurs de la République, profondément écornées dans le 93. Et, à l’approche des jeux olympiques, dont une partie des épreuves s’y déroulera, ce n’est pas le moment de baisser la garde !
Bref, à partir du 1er Janvier 2024, la quasi-totalité des 70 000 agents de l’État travaillant en Seine Saint Denis pourront prétendre à cette prime de fidélisation qui pourrait prochainement (déjà) être revalorisée à 12 000 euros et versée en trois fractions.
A l’heure où l’État promet de réduire son train de vie, voilà qui est surprenant. Mais, surtout, la mesure ne manquera pas de faire des jaloux ! Pourquoi pas une prime de fidélisation territoriale pour inciter les fonctionnaires à aller exercer en Lozère ou au fin fond de l’Aveyron, désertés depuis des années.
Au-delà, les problèmes de recrutement touchent aujourd’hui toute la fonction publique. Rémunérations insuffisantes, sentiment de déclassement, manque de reconnaissance et montée des incivilités en découragent plus d’un à s’engager au service de l’État ou de la fonction publique territoriale. Hier, les jeunes rêvaient de devenir fonctionnaires. Aujourd’hui, ils se voient davantage dans les start-up ou la finance verte et veulent mieux gagner leur vie. Le nombre de candidats au concours de la fonction publique ne cesse de décroître d’année en année : il est passé de 650 000 en 1997 à … 228 000 en 2018.
D’où les efforts déployés par l’État pour redorer l’image des emplois dans le secteur public, au risque d’engager une course en avant, une nouvelle fois très coûteuse pour la dépense publique et donc nos impôts…
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